Ordo Fratrum Minorum Capuccinorum IT

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updated 11:54 AM UTC, Mar 20, 2024

fr. Alfredo Rava OFMCap

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CHAPITRE VIII DES CONSTITUTIONS

LE GOUVERNEMENT DE NOTRE ORDRE

frère Alfredo Rava OFMCap

Depuis toujours, dans la structure normative des Frères Mineurs (Deuxième Règle, divers textes des Constitutions, à partir des Constitutions capucines de 1536, etc.) le chapitre VIII a été réservé sous des titres différents, à la présentation du « Gouvernement de l’Ordre »[1]. Dans nos Constitutions post-conciliaires (1968), le titre a changé (il était auparavant « le gouvernement de l’Ordre ou Fraternité ») et, à quelques petites variations près, la succession des articles est la même.

Le numéro d’ouverture des Constitutions actuelles (no 117) nous invite à considérer « l’Ordre dans l’Église », à la « construction [edificare] » de laquelle tous les frères sont appelés « dans la charité » et indique comment les « chapitres » et « supérieurs » (figures qui exercent le pouvoir de gouvernement) doivent être « une expression de l’unité spirituelle et visible de l’Ordre » et comment ils sont appelés à agir pour nourrir « le lien de communion entre les frères », exerçant l’autorité reçue en « esprit de service et avec sollicitude pastorale ».

Ne négligeons pas l’importance de la dernière phrase : elle indique de fait « l’extension » de l’autorité des chapitres et des supérieurs, autorité qui doit s’exercer non pas arbitrairement mais toujours dans le respect des normes du « droit universel et de ces constitutions ».

Si nous parcourons brièvement le titre des différents articles, le chapitre VIII décrit :

- la structure de l’Ordre (art. I) : les différentes « circonscriptions » (no 118) ; érection, suppression et modification des circonscriptions (no 119) ; construction et suppression de maisons (no 120) ; incorporation des frères dans l’Ordre et agrégation à une circonscription (no 121) et collaboration entre circonscriptions.

- les supérieurs et les charges en général (art. II) : les supérieurs de l’Ordre et leur pouvoir de gouvernement (no 122), l’attribution des charges (no 123).

- le gouvernement général de l’Ordre (art. III) : le Chapitre général : identité (no 124), devoirs et élections (no 125) ; le vicaire général (no 126), les charges vacantes (no 127) et la curie générale (no 128).

- le gouvernement des provinces (art. IV) : le chapitre provincial : identité (no 129) ; électeurs et modalités de célébration (no 130) ; le chapitre par délégués (no 131) ; les élections ou la nomination du ministre provincial et des conseillers (nos 132-133) ; le vicaire provincial et la vacance des charges (no 134) ; la curie provinciale (no 135).

- le gouvernement des custodies (art. V) : la custodie : identité et nature, le custode et le chapitre de la custodie (no 136) ; le custode et son conseil (no 137) ; les membres de la custodie (no 138).

- le gouvernement des fraternités locales (art. VI) : la fraternité locale et le gardien (no 139) ; le vicaire local et les conseillers (no 140) ; le Chapitre local (no 141) ; les archives (no 142).

- la collaboration dans l’Ordre (art. VII) : le Conseil Plénier de l’Ordre (no 143), les Conférences des Supérieurs Majeurs (no 144), et nos structures de gouvernement pour notre mission et vocation (no 145).

Dans le chapitre VIII on trouve donc les fondements structurels de l’exercice de l’autorité et du pouvoir de gouvernement dans notre Ordre, mais ceux-ci ne sont pas présents uniquement dans ce chapitre : les compétences et l’exercice du pouvoir de gouvernement aussi bien collectif (chapitres) qu’individuel (supérieurs majeurs) sont rapportés dans de nombreuses autres parties de nos Constitutions.

Ce chapitre énonce essentiellement « qui » exerce le pouvoir et quelle est la nature de celui-ci, mais « comment » il s’exerce, dans quelles circonstances et avec quelles « contraintes », cela se déduit du reste des Constitutions et des Ordonnances des chapitres généraux, documents que nous devons prendre en considération afin d’avoir sur le « gouvernement de notre Ordre » une réflexion complète.

La structure de l’Ordre des Frères Mineurs Capucins (Art. I)

Ordre, circonscription et fraternité locale : tels sont les « sujets » qui composent structurellement l’Ordre des frères mineurs capucins. En référence à eux et aux différentes étapes de la vie dans l’Ordre, des termes différents sont utilisés dans le texte que nous allons maintenant analyser.

On est « admis » dans l’Ordre par différentes étapes (postulat, noviciat et professions temporaire et perpétuelle) par le ministre général, ou, dans chaque province, par le ministre provincial, qui peut déléguer cette faculté au vicaire provincial et au custode (Const. 20) qui sont tenus de demander l’avis (noviciat) ou le consentement (profession) de leur Conseil (Const. 21).

Par la profession des conseils évangéliques on est « incorporé » dans l’Ordre (Const. 121,1 – can. 654) avec des droits et devoirs définis juridiquement : l’incorporation est définitive, donc avec droits et devoirs pléniers, seulement lors de la profession perpétuelle, et les profès temporaires ont des droits et devoirs (limités) définis par nos constitutions[2].

Toujours à travers la profession, on est « agrégé » à une circonscription de l’Ordre (Const. 118,1 ; 121,1) c’est-à-dire « ordinairement les provinces et les custodies » (Const. 118,2). On peut aussi changer la circonscription à laquelle on est attaché : cela « appartient au ministre général (…), avec le consentement de son Conseil, en considération du bien de l’Ordre et des nécessités des circonscriptions ou des frères eux-mêmes, après consultation des supérieurs majeurs et de leurs Conseils » (Const. 121,3).

Enfin, on est « affecté » à une fraternité locale, une maison légitimement constituée qui dépend du supérieur d’une circonscription ou directement du ministre général (Const. 118,9).

Le terme « incardiné » (dans l’Ordre) est utilisé exclusivement pour les frères, déjà profès perpétuellement, qui ont reçu les ordres sacrés (du diaconat cf. can. 265-266) : ce terme (ainsi que celui d’incardination) n’apparaît pas même une seule fois dans nos Constitutions.

1. Les circonscriptions

Les circonscriptions sont « ordinairement les provinces et les custodies » (Const. 118,2), qui se caractérisent par trois éléments fondamentaux (Const. 118,3) :

1. les frères : un groupe de frères

2. les fraternités locales : maisons légitimement constituées gouvernées par un gardien (Const. 118,8)

3. le territoire « propre et exclusif » déterminé dans le décret d’érection du ministre général (Const. 119,1).

La « province », partie principale et immédiate de l’Ordre, est gouvernée par le ministre provincial (Const. 118,6). Le Code la définit comme « l’union de plusieurs maisons, qui constitue une partie immédiate du même institut sous un même supérieur et est érigée canoniquement par l’autorité légitime » (can. 621) : une définition strictement juridique et sèche de la province, qui ne détermine pas les critères pratiques de sa mise en place, n’en détermine pas l’identité ni la sphère d’autonomie et qui varie selon la nature et le patrimoine de l’institut[3].

La législation prévoit une « pluralité » de maisons, ce qui en soi n’est pas un critère suffisant pour l’érection d’une province, car « il faut que la pluralité devienne unité d’un point de vue juridique. L’unité de celles-ci (« coniunctio ») est nécessaire. Sans cette unité, les maisons particulières ne pourraient pas être considérées comme une nouvelle entité, dotée d’une personnalité juridique »[4]. Comme l’affirment les Constitutions (no 118,6) « elle a une consistance propre qui lui permet d’exprimer et de développer la vitalité de notre charisme pour un témoignage apostolique efficace et à l’avantage de la vie de l’Ordre ».

Pour garantir cette unité a été institué un supérieur, appelé « ministre provincial », qui est aussi « supérieur majeur », avec le pouvoir nécessaire pour gouverner la province en tant que partie immédiate de l’institut (Const. 118,6 – 122,1).

Pour que ces éléments constitutifs essentiels aboutissent à l’érection de la province, un décret formel est nécessaire, donné par écrit par l’autorité compétente selon les Constitutions (can. 581 et Const. 118,5).

La « custodie » (qui remplace la vice-province) est une partie de l’Ordre dans laquelle les frères, mis au service des Églises et de leurs pasteurs dans l’œuvre de l’évangélisation, développent progressivement la présence de la vie consacrée à travers l’engagement pour l’implantatio Ordinis. On distingue les custodies provinciales, qui sont confiées à une province et les custodies générales, qui dépendent immédiatement du ministre général (Const. 136,1). Les principaux éléments qui la caractérisent sont : un groupe de frères, la dépendance à une province, la vie missionnaire dans un territoire déterminé, un « responsable » appelé « custode ».

Une autre structure envisagée par notre législation est la « délégation » (ord. 8/25) dont le « but est d’assurer la vie fraternelle sur une aire géographique où, malgré la présence de plusieurs fraternités, il n’y a pourtant pas les conditions nécessaires et suffisantes pour ériger ou maintenir une circonscription ». Toujours érigée par le ministre général avec le consentement de son propre conseil (ord. 8 / 25,3), elle se caractérise par plusieurs éléments : son caractère transitoire, un groupe de frères, la dépendance à une province, un supérieur « délégué » par le ministre provincial, qui, bien que n’étant pas supérieur majeur, a les pouvoirs suffisants pour faciliter le gouvernement pratique, pastoral et administratif de la délégation avec une certaine autonomie de fonctionnement interne du groupe (ord. 8 / 25,6).

Dans des circonstances particulières, le ministre général, les conditions prévues pour les modifications de circonscriptions étant observées, peut également constituer une fédération de plusieurs provinces, dotée d’un statut propre. Cette figure juridique comporte l’unification du gouvernement : un seul ministre provincial, avec son Conseil, qui a juridiction sur toutes les provinces fédérées (ord. 8/2).

Le pouvoir de gouvernement dans notre Ordre (Art. II-III-IV)

Dans tous les instituts religieux, deux « sujets » jouissent du pouvoir, les supérieurs et les chapitres, qui « ont sur les membres le pouvoir défini par le droit universel et par les constitutions » (can. 596 § 1).

Le service de l’autorité s’exerce en fonction du charisme propre du fondateur : « les supérieurs des religieux ont le grave devoir et la responsabilité primordiale de veiller avec soin à la fidélité de leurs confrères envers le charisme du fondateur »[5] parce que « l’autorité de l’institut n’a pas seulement pour tâche d’organiser la vie de l’institut, mais surtout d’accompagner celui-ci et chacun de ses membres sur leur chemin de fidélité au plan de Dieu et de l’Église sur l’institut »[6].

Les frères capucins sont un institut religieux clérical de droit pontifical (même si cela n’est mentionné nulle part dans nos constitutions) ; le can. 596 § 2 établit que, dans de tels instituts, les deux sujets précités, en plus du pouvoir commun, « possèdent en outre [insuper] le pouvoir ecclésiastique de gouvernement tant au for externe qu’au for interne ».

Dans notre Ordre, nous avons donc l’exercice d’un pouvoir personnel, celui des supérieurs (ministre général, provincial et custode) qui est en « acte » d’une manière ordinaire et d’un pouvoir collégial, celui des chapitres (général, provincial et de custodie) qui agit dans les limites de leur durée (de manière extraordinaire) : ce sont deux formes de gouvernement complémentaires et aucune ne peut s’exercer de façon exclusive[7].

1. Le pouvoir personnel : les ministres général et provinciaux et leurs vicaires

Nos constitutions (122,1) établissent que sont supérieurs avec un pouvoir « ordinaire propre » : le ministre général dans tout l’Ordre, le ministre provincial dans sa province et le supérieur local ou gardien dans sa fraternité, alors que jouissent d’un pouvoir « vicarial ordinaire » : le vicaire général, le vicaire provincial, les custodes et le vicaire local (122,2). Le no 122,3 ajoute que « tous ceux-là, à l’exception du supérieur local et de son vicaire, sont supérieurs majeurs ».

À notre avis, la formulation donnée dans nos constitutions doit être mieux expliquée, afin de bien clarifier le contenu et la nature du pouvoir dont jouissent les différents sujets.

Comme nous l’avons déjà évoqué, dans notre Ordre les supérieurs majeurs jouissent du pouvoir ecclésiastique de gouvernement (can. 596 § 2) et sont considérés « Ordinaires » comme les évêques diocésains, leur ordinariat se limitant en l’occurrence aux membres de l’institut religieux. Selon la norme du canon 134 § 1, le nom d’Ordinaire désigne également les supérieurs majeurs des instituts religieux, et précisément en tant qu’Ordinaires, ils jouissent du pouvoir « ordinaire » (qui est la propriété attachée à un office ecclésiastique exercé en son nom propre ou de manière vicaire - voir can. 129 §2).

Il semble donc étrange que Const. 122,1 affirme que le supérieur local ou gardien jouisse également du pouvoir « ordinaire propre », et que le vicaire local ait également un « pouvoir ordinaire vicarial ». Ceux-ci en effet, conformément à Const. 122,3 ne sont pas des supérieurs majeurs et n’entrent donc pas dans la catégorie des Ordinaires ; par conséquent, ils ne jouissent pas, à notre avis, du pouvoir « ordinaire », mais seulement de ce pouvoir commun que leur reconnaissent nos constitutions.

Comme nous l’avons déjà mentionné, le ministre général gouverne l’institut tout entier (il est également appelé le « modérateur suprême ») et c’est le « ministre provincial » qui gouverne la province (voir aussi can. 620) ; l’extension de l’exercice du pouvoir est régie par le can. 622, où il est établi que « le modérateur suprême a pouvoir sur toutes les provinces, les maisons et les membres de l’institut, qu’il exercera selon le droit propre ; les autres supérieurs possèdent ce pouvoir dans les limites de leur charge ».

Ceux-ci sont ordinairement élus au cours de leurs chapitres respectifs (Const. 125,2 ; 132,1). Le ministre et le vicaire provinciaux, cependant, peuvent également être nommés par le ministre général, mais uniquement pour des raisons graves (133,1)[8].

En ce qui concerne le type de pouvoir de gouvernement qu’ils exercent, c’est-à-dire législatif, exécutif ou judiciaire, les supérieurs majeurs dans l’exercice personnel de ce pouvoir ne bénéficient que des pouvoirs exécutif et judiciaire. En effet, le pouvoir législatif dans les instituts religieux s’exerce normalement, comme nous le verrons, au niveau collégial et n’est pas une prérogative du pouvoir personnel.

Le pouvoir judiciaire est réservé aux supérieurs ou aux organes désignés à cet effet par la loi propre : selon la norme du can. 1427 § 1-2 en effet, le supérieur majeur (modérateur suprême ou provincial) juge les causes internes de son propre institut religieux et a aussi la faculté d’engager une procédure pénale, selon la norme du can. 1717s, envers les membres de l’institut.

Le ministre général et le ministre provincial exercent avant tout le pouvoir exécutif, pour leurs domaines de compétence respectifs (sur les membres ou les maisons de tout l’institut ou d’une de ses parties) : le contenu spécifique de ce pouvoir est disséminé dans les différents numéros des constitutions, dans les différentes situations où la décision est réservée au pouvoir personnel du supérieur majeur, compte tenu également du droit universel. Les ministres respectifs sont aussi les premiers administrateurs des biens temporels de l’Ordre ou de la province.

Nous avons vu que les vicaires (général et provinciaux) jouissaient d’un pouvoir « vicarial ordinaire ». Pour mieux comprendre, abordons la doctrine où sont distingués le « vicaire » qui est toujours « en acte » (vicaire général ou épiscopal dans un diocèse) et le « vicaire » qui n’agit que par suppléance.

« Nos » vicaires sont ici entendus « au sens strict » : ils n’exercent le pouvoir de gouvernement (vicaire) en tant que supérieurs majeurs que lorsqu’ils sont appelés à remplacer les supérieurs titulaires de l’office[9] dans les cas où ceux-ci sont absents, empêchés ou lorsque leur fonction a cessé pour diverses raisons (démission, privation ou décès) : cf. Const. 126,1.3 ; 127,1-4 ; 134,1-3. Les « vicaires » (général et provinciaux) sont aussi élus ordinairement au cours de leurs chapitres respectifs (Cost. 125,6 ; 132,4).

On entend différemment l’exercice du pouvoir de gouvernement « ordinaire vicaire » dont jouit le custode : c’est un pouvoir toujours en acte, que le custode exerce au nom du ministre général (dans les custodies générales) ou au nom du ministre provincial (dans les custodies provinciales) et dont l’extension est exprimée et reconnue par nos Constitutions (par ex : Const. 136,6-7) ; en outre, le ministre concerné doit lui conférer par écrit les pouvoirs qui lui sont délégués et indiquer ceux qu’il se réserve[10].

Dans l’exercice de leur pouvoir, conformément au can. 627 § 1 « les supérieurs auront leur propre conseil, auquel ils devront recourir dans l’exercice de leur charge [ad normam constitutionum, Superiores proprium habeant consilium, cuius opera in munere exercendo utantur oportet] » : ce coetus « n’est pas un organe de gouvernement, mais de collaboration avec le gouvernement, par l’apport de l’avis ou du consentement qu’il est appelé à donner : c’est à proprement parler un organe de consultation et de participation. Les conseillers ne sont donc pas supérieurs. Le Conseil n’est pas une personne juridique, mais simplement un « coetus » ou un groupe de personnes appelées à prendre position ensemble dans l’unité mais leur manière de procéder n’est pas strictement collégiale »[11]. Le conseil général de notre Ordre n’agit de manière collégiale que dans les cas prévus (cf. can. 699 §1 ; ord. 4/6, 6/8, 6/9[12]) alors que le Conseil provincial que dans un seul cas (Const. 134,5[13]).

Les conseillers sont ordinairement élus au cours des chapitres respectifs (Const. 125,5 ; 132,3) ou nommés s’ils doivent être remplacés ou s’il y a des raisons sérieuses (Const. 133,1).

Tous les actes de gouvernement qui sont posés dans notre Ordre sont proprement des actes du « supérieur » (ministre général ou provincial) lequel, dans les cas prévus par les Constitutions et le droit commun, est lié à l’intervention de son propre Conseil pour pouvoir les poser.

Le can. 627 § 2 précise que : « outre les cas prescrits par le droit universel, le droit propre déterminera ceux pour lesquels le consentement ou l’avis est requis pour la validité des actes selon le can. 127 ». Lequel can. 127 § 1 énonce que le « consentement » est l’approbation de la majorité absolue du collège ou du groupe de personnes présentes au moment de la demande. La formulation de cette norme s’est avérée insuffisamment claire, laissant subsister un doute : le supérieur qui a besoin d’obtenir le « consentement » participe-t-il au vote ou non ?

A ce propos, la Commission Pontificale pour l’Interprétation Authentique du Code de Droit Canonique, interrogée sur ce doute, a répondu « négativement », c’est-à-dire que le supérieur ne peut pas déterminer la majorité par son consentement, ni résoudre la parité avec son propre suffrage[14]. La raison de cette réponse réside dans le fait que le can. 127 présente la personne morale ou le groupe de personnes comme distinct du supérieur qui demande le consentement.

Cependant, la pratique de nombreux instituts religieux est que le supérieur majeur est considéré comme « faisant partie » du conseil et participe à la formation de la majorité par son vote, et pour divers auteurs, le fait que le can. 627 utilise l’expression « selon les constitutions », ouvre la possibilité de trancher la question et retire du poids à l’interprétation authentique.

Afin de mieux clarifier la question, étant donné que nos constitutions ne traitent pas explicitement de la question, je rapporte un résumé bref mais précis de V. De Paolis, très utile pour agir concrètement. Il existe plusieurs hypothèses et pratiques :

a) Le supérieur est considéré séparément par son conseil ; par conséquent, il ne contribue pas à former la majorité requise du conseil lui-même : dans ce cas le can. 127 s’applique rigoureusement.

b) Le supérieur est considéré séparément par son conseil et ne contribue pas à la formation de la majorité, mais il peut départager par son vote en cas d’égalité.

c) Le supérieur forme, pour l’acte à poser, un groupe avec son conseil, de sorte que l’acte soit posé collégialement par le groupe, supérieur compris, par analogie avec ce qui est prescrit par le can. 699.

d) Le supérieur n’est considéré comme membre du groupe que pour former la majorité nécessaire [le consentement requis] pour qu’il puisse accomplir un acte qui n’appartient qu’à lui. C’est la pratique courante et qui semble répondre le mieux aux exigences de la vie religieuse. Nous nous arrêtons donc pour l’expliquer plus en détail.

Dans les cas où le supérieur a besoin du consentement du conseil pour agir, deux actes doivent être distingués : l’acte que le supérieur est appelé à accomplir, et l’acte par lequel le conseil donne son consentement au supérieur pour cela. Le premier acte est de la responsabilité du supérieur ; il n’appartient qu’à lui ; il en porte la responsabilité comme supérieur. Cependant, pour qu’il puisse agir, le supérieur a besoin du consentement de son conseil : la formation du consentement est un acte préalable, un prérequis nécessaire à la validité même de l’acte du supérieur.

Dans la formation de cet acte préalable, le supérieur peut être considéré comme membre de son conseil. En formant cet acte préliminaire, le conseil agit selon une procédure collégiale, semblable à la procédure prescrite pour la révocation des religieux, selon la norme du can. 699 § 1.

En fait, dans l’hypothèse dont nous parlons, nous avons une procédure collégiale dans la formation du consentement, c’est-à-dire dans l’acte antérieur à la décision du supérieur. De cette manière, le supérieur pèse et évalue avec son conseil, en formant une unité avec lui, les raisons pour ou contre une décision déterminée à prendre : à l’issue de l’évaluation réalisée ensemble, il aboutit à la décision de donner son consentement ou non.

Dans cette perspective, on comprend pourquoi le supérieur doit nécessairement convoquer le conseil lorsqu’il doit en demander le consentement. La formation de celui-ci advient en effet au terme d’une confrontation réciproque, où chacun s’enrichit des raisons de l’autre : chose possible uniquement si l’on discute ensemble et si chacun entend les raisons de l’autre.

Une fois que le Conseil a donné son consentement [s’il y a vote, le supérieur ne participe pas], le supérieur est en mesure d’assumer ses responsabilités comme supérieur, en prenant ses décisions. Le consentement de son conseil lui a ouvert la voie, mais il n’est pas tenu d’agir : il peut agir. L’obligation d’agir, lorsqu’elle existe, ne vient pas du fait qu’il a obtenu le consentement de son conseil, mais de la nécessité, qui peut provenir d’un autre motif, de prendre une décision en la matière.

C’est dans cette perspective que se perçoit le sens du § 3 du canon 127 : « tous ceux dont le consentement ou l’avis est requis sont tenus par l’obligation d’exprimer sincèrement leur sentiment, et si la gravité des affaires le demande, d’observer soigneusement le secret, obligation que le supérieur peut exiger ».

La législation exige que, dans les cas les plus importants, le supérieur ait le consentement ou l’avis de son conseil, afin que la décision puisse être prise avec pondération, après avoir évalué toutes les raisons par tous. Pour cela, il est nécessaire que quiconque doit donner un avis ou un conseil connaisse les faits de la manière la plus objective et la plus large possible. Chacun est appelé à en donner son évaluation, selon sa façon de voir, avec sincérité et objectivité.

Ce n’est qu’ainsi que la confrontation est enrichissante et qu’elle peut offrir au supérieur tous les éléments nécessaires pour l’aider à faire un choix. Pour qu’il soit possible que tous les faits soient connus de tous les membres du conseil et pour que chacun soit libre d’exprimer son opinion, le secret est nécessaire, signe de respect de la réputation des personnes susceptibles d’être impliquées, de respect aussi des personnes qui expriment librement leurs opinions, et de respect enfin pour le supérieur qui est alors appelé à assumer la responsabilité de la décision, pour laquelle on est appelé à donner son consentement ou son opinion[15].

2. Le pouvoir collégial : les chapitres généraux et provinciaux

« Le chapitre, à chaque niveau, est un organe collégial temporaire et il exerce son autorité propre, selon les compétences qui lui sont reconnues par les Constitutions » : cette définition donnée par nos ord. (8/7) contient plusieurs éléments utiles pour comprendre la nature du « sujet » du pouvoir collégial dans notre Ordre.

Premièrement, comme nous l’avons déjà évoqué, il nous est rappelé ici que son action et son exercice du pouvoir de gouvernement sont temporaires : ils durent le temps de sa célébration.

Ensuite est exprimée la « mesure » de son autorité : « selon les compétences qui lui sont reconnues par les Constitutions ». Cette expression nous aide à comprendre ce que signifie que « le chapitre général (…) détient l’autorité suprême dans l’Ordre » (Const. 124,1) et que « l’autorité première dans la province revient au Chapitre provincial » (Const. 129,1).

a. Le chapitre général

A propos du chapitre général, il semble important de préciser que « l’autorité suprême » ne doit évidemment pas être comprise dans le sens d’un pouvoir de disposer et de décider de tout, mais seulement « conformément aux Constitutions » (cf. can. 631 § 1), et donc aussi en dépendance de l’autorité ecclésiastique[16] qui assure la « recognitio » du code fondamental.

Le chapitre général est un organe collégial ayant autorité, qui se compose de plusieurs personnes physiques opérant sur un pied d’égalité, en tant que représentant et expression de tout l’institut « convoqué à échéances déterminées, pour assurer la vitalité de la famille religieuse à travers les élections et la résolution des problèmes inhérents au développement spirituel, formatif, apostolique des membres et des activités »[17] de l’institut, avec la particularité d’exercer le pouvoir législatif. Quant à son mode de fonctionnement, les règles régissant les personnes morales collégiales lui sont appliquées[18], étant « un véritable collège, dont l’action est déterminée par ses membres, qui contribuent à prendre des décisions conformément au droit universel et au droit propre »[19].

Le can. 631 § 1 énumère les compétences du chapitre général : 1) protéger le patrimoine de l’institut mentionné au can. 578 ; 2) favoriser un renouvellement adéquat de l’institut et en harmonie avec le chapitre général ; 3) élire le modérateur suprême ; 4) traiter des questions de plus grande importance ; 5) émettre les règles particulières de l’institut, que tous (les membres) sont tenus d’observer[20] : ces éléments sont exprimés pour nous en Const. 125,1[21].

Le pouvoir du chapitre général, en tant que pouvoir ecclésiastique de gouvernement, est législatif, exécutif et judiciaire. Le chapitre général a pour tâche de publier des normes contraignantes pour tout l’institut : ce pouvoir normatif existe dans tous les instituts religieux mais « dans ceux cléricaux de droit pontifical il est appelé législatif et fait partie de la juridiction ecclésiastique »[22] : il s’agit d’un « vrai pouvoir législatif », qui s’exprime spécifiquement avec la promulgation des constitutions ou code fondamental[23] (can. 587 §§ 1, 2, 3), qui doivent toujours être soumises à l’approbation de l’autorité ecclésiastique[24].

Le chapitre général a toujours le pouvoir d’intégrer les Constitutions, de les modifier, d’y déroger ou de les abroger, selon les besoins du temps, pour favoriser une certaine continuité en vue d’un renouveau approprié, restant sauve toutefois l’approbation du Saint-Siège (Const. 186,1).

Le chapitre général jouit également du pouvoir exécutif, puisque tout le pouvoir de gouvernement lui est propre (cf. can. 596 § 2) et cela se traduit notamment par l’élection du ministre général et des conseillers (au chapitre ordinaire). Les auteurs soulignent que « traditionnellement, l’exercice de ce pouvoir est réservé, par le code fondamental de ces mêmes instituts, aux supérieurs majeurs en tant que pouvoir personnel, assistés en cela de leurs conseils respectifs »[25].

Il ressort toutefois de nos constitutions que certains actes du pouvoir exécutif relèvent de la compétence du chapitre général[26].

En théorie, le chapitre général jouit également du pouvoir judiciaire[27] : nos constitutions ne spécifient pas précisément ce domaine. On y lit seulement que « tout contentieux entre les religieux, comme entre les maisons ou les circonscriptions de l’Ordre seront résolus dans la charité selon les normes du droit et de notre Modus procedendi » (Const. 186 ,5).

b. Le chapitre provincial

Quant au chapitre provincial, le Code ne contient pas de normes universelles qui le régissent, mais renvoie au droit propre, qui est chargé d’en déterminer la nature exacte, l’autorité dont il jouit, la composition, la manière de procéder et la durée de célébration (cf. can. 632).

Rappelons que pour ord. 8/7 « le chapitre, à chaque niveau, est un organe collégial temporaire et il exerce son autorité propre, selon les compétences qui lui sont reconnues par les Constitutions » et qu’au chapitre provincial revient l’autorité première dans la province (Const. 129,1). Ceci doit être interprété en ce sens qu’il est représentatif de la province comme vrai signe de son unité dans la charité. Il doit protéger le patrimoine de l’institut incarné en un lieu spécifique, en tenant compte de ce qui a été établi par le chapitre général, en favorisant le renouveau tel que promu au niveau central et en s’occupant des affaires les plus importantes de la province (Const. 129,4).

Parmi les tâches les plus importantes (dans le chapitre ordinaire) figure l’élection du ministre provincial et de son conseil (Const. 132) qui, comme déjà mentionné, peuvent être nommés dans des cas particuliers et pour des raisons graves par le ministre général avec l’accord du son conseil (Const. 133,1) après avoir consulté les membres de la province elle-même.

Une nouveauté des nouvelles constitutions concerne la durée de « service » en tant que ministre provincial ou custode et elle est contenue dans ord. 8/21 : aucun frère ne peut assumer de telles charges « pour plus de trois mandats consécutifs, quelle que soit la manière légitime selon laquelle cet office lui a été conféré. Après le troisième mandat consécutif, la possibilité d’élection, de nomination ou de postulation est exclue »[28].

Une autre nouveauté concerne la composition du chapitre provincial : il peut être célébré au suffrage direct (avec la participation de tous les frères de vœux perpétuels), ou par des délégués (qui représentent toute la province - Const. 130,2), selon les dispositions des ordonnances des chapitres généraux, lesquels établissent au no 8/18 que « les provinces qui ont cent ou moins de cent frères célèbrent le chapitre au suffrage direct ; les provinces qui ont un nombre de frères supérieur à cent, célèbrent le chapitre par délégués ». Le contraire est aussi prévu pour les deux cas mais seulement sous certaines conditions.

Ord. 8/19 établit ensuite que sont privés de voix active et passive dans les chapitres les frères qui ont été déclarés absents illégitimes, ceux qui ont présenté une demande d’exclaustration, de dispense des vœux religieux ou des obligations liées aux ordres sacrés et de même les frères qui ont présenté une demande d’absence de leur maison religieuse peuvent en être privés par le ministre provincial, avec l’accord de son Conseil[29].

En ce qui concerne le pouvoir de gouvernement, le chapitre provincial ne jouit sans aucun doute d’aucun pouvoir législatif, puisqu’il appartient au chapitre « général » de publier le code fondamental. Il jouit du pouvoir exécutif pour les élections, pour l’approbation des règlements de sa célébration, pour prendre les décisions que les Constitutions délèguent aux provinces et pour « établir des statuts particuliers » (y compris éventuellement les statuts économiques) qui doivent alors « être approuvés par le ministre général avec le consentement de son conseil » (Const. 186,4)[30].

Le gouvernement des custodies (art. V)

La custodie est une circonscription de l’Ordre confiée à une province ou qui dépend directement, pour des circonstances particulières, du ministre général – la même norme lui est alors appliquée par analogie (Const. 136).

Les nouvelles Constitutions présentent ici encore une nouveauté : les « vice-provinces » provinciales et générales disparaissent et la seule circonscription en dehors de la province est la custodie.

Comme nous l’avons déjà évoqué, chaque custodie est confiée à un supérieur, le custode (qui a son propre conseil à convoquer dans les cas prévus par les Constitutions), qui est normalement élu lors du chapitre (Const. 136,4) ou dans des cas extraordinaires nommé par le ministre provincial (Const. 136,11). Comme nous l’avons vu, il jouit d’un pouvoir ordinaire vicaire, dont nous avons déjà exposé la nature, qu’il acquiert dès le moment de la confirmation de son élection (Const. 136,6)[31].

A celui-ci peut s’ajouter des facultés, qui lui sont déléguées par le ministre provincial (Const. 136,3)[32] : ces facultés s’ajoutent au pouvoir vicaire ordinaire dont jouit le custode afin de favoriser le gouvernement quotidien de la circonscription, surtout si celle-ci se trouve éloignée de la province. Il en est de même pour les custodies qui dépendent directement du ministre général.

Chaque custodie a son propre chapitre ordinaire électif et, si c’est opportun, un autre extraordinaire, que le custode doit convoquer après avoir obtenu le consentement du ministre concerné, chapitre qui, en plus de traiter des problèmes inhérents à sa propre réalité, doit également rédiger les règlements de sa célébration et le statut de la custodie (Const. 136,8).

Tous les frères qui y sont attachés ou envoyés pour une période déterminée ou qui y ont fait profession appartiennent à la custodie (Const. 138,1). La province est tenue, si possible, d’envoyer les religieux nécessaires à celle-ci et, en les choisissant, de prendre en considération les aptitudes particulières des frères par rapport au lieu, à la formation des frères et l’apostolat à y exercer (Const. 138,3-4).

Le gouvernement des fraternités locales (art. VI)

Chaque fraternité locale est « gouvernée » par un gardien, nommé par le ministre provincial avec le consentement de son conseil, qui est chargé de constituer les fraternités.

Les gardiens jouissent de ce « pouvoir » qui leur est reconnu par les Constitutions (can. 596 §1), qui les désignent avant tout comme animateurs de la fraternité (Const. 140,5) : le contenu concret de ce pouvoir peut être perçu en divers points des Constitutions[33].

Le gardien est assisté d’un vicaire qui jouit normalement d’un pouvoir « suppléant », qui devient « effectif » si le gardien est absent, empêché ou si le poste est vacant (Const. 140,1). Lorsque le nombre de frères (au moins six) le prévoit, il est nécessaire de former un conseil de fraternité (gardien, vicaire et conseiller(s)) qui a pour tâche d’aider le gardien dans les choses matérielles et spirituelles ; si cela est prévu par les Constitutions ou par des statuts propres, cette aide peut devenir un véritable « consentement ».

Le chapitre local, qui joue un rôle important dont les tâches sont bien exprimées en Const. 141,2, est composé de tous les frères profès. Des votes ou des élections de divers types (comme celui du conseiller) peuvent y avoir lieu. Lorsqu’ils sont consultatifs, tout le monde participe au vote, tandis que les profès temporaires sont exclus des élections et des votes pour l’admission d’un candidat à la profession perpétuelle.

La collaboration dans l’Ordre (Art. VII)

L’article conclusif du chap. VIII concerne le Conseil Plénier de l’Ordre et les Conférences des Supérieurs Majeurs, présentés comme des outils importants de collaboration entre les différentes réalités de l’Ordre.

Le premier (CPO) est un organe consultatif ayant pour fonction d’exprimer la relation vitale entre toute la Fraternité et le gouvernement central de l’Ordre, de promouvoir la conscience de tous les frères dans la coresponsabilité et la collaboration, de favoriser l’unité et communion de l’Ordre dans la pluriformité. Convoqué par le gouvernement central (Const. 143,3), il est représentatif de toutes les conférences de l’Ordre. Nous pourrions dire, avec les différences qui s’imposent, qu’il remplit dans l’Ordre la fonction qu’a le Synode des Évêques pour le Pontife romain en tant qu’organe de participation à son pouvoir.

Il est convoqué par le ministre général, avec l’accord du Conseil ; à l’issue de ses travaux, chaque CPO élabore des conclusions, à partir desquelles le ministre général peut tirer des indications opérationnelles pour l’ensemble de l’Ordre.

Les Conférences des Supérieurs Majeurs sont des organes d’animation et de collaboration dans un double sens : dans un sens « horizontal » en favorisant la collaboration tant entre les circonscriptions qu’avec les autres organes ecclésiaux et en garantissant, dans la mesure du possible, l’unité d’action et d’apostolat dans un territoire donné et dans un sens « vertical » pour favoriser la responsabilité de chaque ministre envers l’Ordre et la collaboration entre le ministre général et les différents ministres des circonscriptions[34].

Const. 144 établit que les Conférences sont constituées par le ministre général avec le consentement de son conseil et qu’elles sont formées par les ministres provinciaux et par les custodes d’un territoire, auxquels s’ajoutent aussi par ord. 8/30 les représentants des délégations et des domus presentiae du territoire, ainsi que, de droit eux aussi, les conseillers généraux délégués par le ministre général. Tous n’ont pas le droit de vote.

Une chose très importante est que pour assurer le bien de l’Ordre, aussi bien les statuts que le ministre général peuvent prévoir ou autoriser les différentes conférences à adopter des normes spéciales pour les frères et les circonscriptions de leur propre territoire, qui pour être valables doivent être approuvées à l’unanimité par tous les ministres de la conférence, avec l’assentiment de leurs conseils respectifs, et approuvé par le ministre général avec l’assentiment de son conseil (Const. 144,5).

Conclusion

Je ne pense pas qu’il y ait de meilleure conclusion à cette réflexion sur le chapitre VIII de nos constitutions que d’en reproduire intégralement le no 145, conclusif :

Les structures de gouvernement de l’Ordre et ses institutions sont, elles aussi, des expressions de notre vie et vocation, et accompagnent le cheminement de notre Fraternité tout au long de l’histoire. Bien que sujettes aux limites de toute institution temporelle, elles nous aident à développer le sens de l’appartenance à notre famille et [en qualifient] la vie et la mission. Recevons-les donc, en esprit de foi et avec simplicité, comme une opportunité de croissance personnelle et d’aide réciproque, en cherchant en tout le bien commun, au service de l’Église et du Royaume. 

 

Bibliographie essentielle sur le sujet

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v. De Paolis, « Il governo della vita consacrata » [Le gouvernement de la vie consacrée], in Governo fraterno [gouvernement fraternel], G. Gurciullo - E. Strino (dir.), Bologna 2018, 81-97.

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M. Dortel-Claudot, « Le strutture di governo e di partecipazione nelle Congregazioni religiose » [Les structures de gouvernement et de participation dans les congrégations religieuses], in Quaderni di vita consacrata 10, Milano, 1985, 773-792.

P. Etsi, Attività di governo e prassi della consultazione negli istituti di vita consacrata. Una lettura dei canoni 627 e 127 del Codice di Diritto Canonico [Activité de gouvernement et pratique de la consultation dans les instituts de vie consacrée. Une lecture des canons 627 et 127 du Code de Droit Canon], Roma 2001.

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M. Luisi, Gli istituti misti di vita consacrata. Natura, caratteristiche e potestà di governo [Les instituts mixtes de vie consacrée. Nature, caractéristiques et pouvoir de gouvernement], Ariccia 2014.

A. Montan, Gli Istituti di Vita Consacrata [Les institus de vie consacrée], in Il Diritto nel Mistero della Chiesa [Le Droit dans le Mystère de l’Eglise], II, Roma 19902, 270s.

F. Panizzolo, La potestà di governo nella vita consacrata. Linee di sviluppo storico-giuridico ed ecclesiologico del can. 596 [Le pouvoir de gouvernement dans la vie consacrée. Axes de développement historico-juridique et ecclésiologique du canon 596], Venezia 2009.

F. Polliani, Le nuove costituzioni dei Frati Minori Cappuccini [Les nouvelles constitutions des Frères Mineurs Capucins], Milano 2015, 253-269.

A. Rava, La potestà di governo nel rapporto tra il Capitolo e il Superiore maggiore in un istituto religioso clericale di diritto pontificio diviso in provincie [Le pouvoir de gouvernement dans le rapport entre le chapitre et le supérieur majeur dans un institut religieux clérical de droit pontifical divisé en provinces], in QDE (2019) 280-299.

F. Romano, « I superiori del can. 596 nel corpo sociale della Chiesa » [Les supérieurs du canon 596 dans le corps social de l’Eglise], in Teresianum 57 (2006) no 2, 391-448.

Y. Sugawara, « Il governo provinciale di un istituto religioso centralizzato » [Le gouvernement provincial d’un institut religieux centralisé], Periodica 94 (2005) 211-242.

Y. Sugawara, « Rapporto tra Governo Generale e Circoscrizioni di un Istituto Religioso fra unità ed autonomia, condivisione, collaborazione e comunione » [Rapport entre gouvernement central et circonsriptions d’un institut religieux entre unité et autonomie, partage, collaboration et communion], in http://www.gsgr.it/Resource/marzo07-GGCC-bis.pdf



[1] Cf. F. Polliani, Le nuove costituzioni dei Frati Minori Cappuccini [Les nouvelles constitutions des frères mineurs capucins], Milano 2015, 254. L’auteur relève que « dans ces dernières décennies, en raison du développement de l’Ordre et sa situation actuelle, une formulation plus adaptée de notre législation aux nouvelles conditions de l’Ordre s’est imposée. Le chapitre général de 1994 avait déjà évoqué la nécessité d’une “étude plus globale du huitième chapitre”».

[2] Il ne semble pas superflu de relever que nous utilisons souvent l’expression « profession des vœux ». Pour être plus précis, la consécration se fait en réalité par la profession des « conseils évangéliques », tandis que les vœux ne sont que les liens juridiques par lesquels les conseils évangéliques eux-mêmes sont assumés. Dans les ordres religieux comme le nôtre, ce sont des vœux publics (cf. can. 1191-1192)

[3] Cf. A. Rava, « La potestà di governo nel rapporto tra il Capitolo e il Superiore maggiore in un istituto religioso clericale di diritto pontificio diviso in provincie » [Le pouvoir de gouvernement dans le rapport entre le Chapitre et le Supérieur majeur dans un institut clérical de droit pontifical divisé en provinces], in Quaderni di Diritto Ecclesiale (2019) 284-285.

[4] V. De Paolis, La vita consacrata nella Chiesa [La vie consacrée dans l’Eglise], Venezia 2010, 353.

[5] Sacrée Congrégation pour les Religieux et les Instituts séculiers - sacrée congrégation pour les évêques, note directive Mutuae relationes [= MR], 14 mai 1978, 14, in EV 6, 619. Cf. V. De Paolis, La vita consacrata nella Chiesa, cit., 231-232.

[6] V. De Paolis, « Il governo della vita consacrata » [Le gouvernement de la vie consacrée], in Governo fraterno [Le gouvernement fraternel], G. Gurciullo - E. Strino (dir.), ed., Bologna 2018, 88. Nous signalons cet ouvrage où l’on peut trouver quelques autres réflexions intéressantes au sujet du gouvernement : le rapport autorité-obéissance (L. Gaetani) ; la dimension anthropologique du gouvernement (F. Alberoni) ; la perspective ecclésiologique (N. Galantino) et juridique (P. Gherri) du gouvernement.

[7] Cfr. M. Luisi, Gli istituti misti di vita consacrata. Natura, caratteristiche e potestà di governo [Les instituts mixtes de vie consacrée. Nature, caractéristiques et pouvoir de gouvernement], Ariccia 2014, 16 : « il apparaît clairement que le gouvernement des instituts est de deux genres : le premier est exercé moyennant une autorité de type personnel, constituée par des supérieurs ; le second est en revanche de type collégial et il est exercé au moyen d’organes pluripersonnels comme les chapitres. Ces deux formes de gouvernement sont complémentaires et aucune ne peut être exercée de manière exclusive ». Cf. aussi : Sacrée Congrégation pour les Religieux et les Instituts séculiers, Decretum circa regiminis ordinarii rationem et religiosi sæcularizati accessum ad officia et beneficia ecclesiastica, 2 février 1972, in AAS 64 (1972) 393-394; V. De Paolis, La vita consacrata…, cit., 232. Lequel affirme que « le gouvernement de l’institut n’est jamais purement et simplement collégial ou personnel […] mais on peut parler de gouvernement personnel à dimension collégiale ou de gouvernement collégial qui renvoie à un gouvernement personnel ».

[8] Const. 133,1 : « pour des raisons graves, le ministre général avec le consentement de son Conseil peut nommer le ministre provincial et les conseillers, après avoir reçu par écrit le vote consultatif de tous les frères profès perpétuels de la province. Mais une telle procédure ne peut pas être appliquée deux fois de suite ».

[9] A. Calabrese, Istituti di vita consacrata e Società di vita apostolica [Instituts de vie consacrée et sociétés de vie apostoliques], Città del Vaticano 20103, 97.

[10] Cf. V. De Paolis, La vita consacrata…, cit., 349 : « les vicaires ont toutefois une configuration différente dans le droit propre. Il y a des vicaires qui ont et exercent toujours le pouvoir, cumulativement, même si subordonnément au supérieur. D’autres ont le pouvoir et l’exercent seulement dans les cas prévus par le droit, comme par exemple, quand le supérieur est absent ou empêché. Dans le premier cas le vicaire est toujours supérieur majeur et a les facultés liées à l’office. Dans le second cas en revanche, il est supérieur majeur seulement quand il est en exercice, parce que c’est seulement dans ces cas-là qu’il est de facto supérieur ».

[11] Cf. V. De Paolis, La vita consacrata…, cit., 369.

[12] Le conseil général agit collégialement : a) Can. 699§1 : dans l’évaluation des preuves en cas de renvoi d’un religieux ; b) Ord. 4/6 : pour décider de l’usage des biens d’une circonscription supprimée ; c) Ord. 6/8 : pour associer à l’Ordre un monastère de Clarisses Capucines ; d) Ord. 6/9 : pour agréger à l’Ordre un institut de vie consacrée.

[13] Si [...] le office de vicaire provincial devient vacant, le nombre des conseillers se reconstitue d’abord, puis le ministre provincial avec son Conseil élit sous forme collégiale et au scrutin secret un autre vicaire provincial de l’intérieur du Conseil. Le ministre général en sera informé.

[14] Commission pontificale pour l’interprétation authentique du Code de Droit Canonique, Réponse II, 14 mai 1985, (AAS 77 [1985] 771) 1er août 1985 : EV 9/1661.

[15] V. De Paolis, , La vita consacrata…, cit., 372-373. Cf. aussi P. Etsi, Attività di governo e prassi della consultazione negli istituti di vita consacrata. Una lettura dei canoni 627 e 127 del Codice di Diritto Canonico [Activité de gouvernement et pratique de la consultation dans les instituts de vie consacrée. Une lecture des canons 627 et 127 du Code de Droit Canon], Roma 2001 ; A. Gardin, « Il rapporto tra il Superiore Generale e il suo consiglio » [Le rapport entre le supérieur général et son conseil], Informationes Scris 29 (2003) 53-70.

[16] Cf. F. Iannone, Il Capitolo generale. Saggio storico giuridico [Le chapitre général. Essai historique juridique], Napoli 1988, 66. L’auteur dans la note 2, p. 66, souligne qu’« il faut garder à l'esprit que la Suprema Auctoritas, tant externe qu’interne, des instituts religieux est le Pape (cf. can. 590 § 1). Il est le véritable supérieur au sens strict du terme, il est le sommet de la hiérarchie interne de l’institut au point que ses membres lui doivent l’obéissance aussi en vertu du lien sacré de l’obéissance » (can. 590 § 2). C’est la raison pour laquelle l’expression du canon ne nous paraît pas extrêmement correcte : « le chapitre général... détient l’autorité suprême dans l’Ordre » même si dans le même canon le législateur l’atténue en ajoutant la clause « selon les Constitutions », qui sont le texte fondamental du droit propre et qui doit être approuvé par l’Autorité suprême effective (cf. can. 587 § 2).

[17] Sacrée congrégation pour les instituts de vie consacrée et les sociétés de vie apostolique, Natura e Finalità dei Capitoli Generali [Nature et finalité des Chapitres généraux], in Informationes SCRIS 2 (1976) 216.

[18] Cf. A. Montan, « Gli Istituti di Vita Consacrata » [Les instituts de vie consacrée], in Il Diritto nel Mistero della Chiesa [Le Droit dans le Mystère de l’Eglise], II, Roma 19902, 271.

[19] Sacrée congrégation pour les instituts de vie consacrée et les sociétés de vie apostolique, Natura e Finalità …, cit., 131.

[20] Cf. A. Montan, Gli Istituti di Vita Consacrata, cit., 273, qui précise qu’« il s’agit bien-sûr d’une énumération non-exhaustive. D’autres tâches pourront être ajoutées par le droit propre des instituts particuliers ».

[21] Const. 125,1 : « le chapitre général, tant ordinaire qu’extraordinaire, traite des affaires concernant la fidélité à nos saines traditions, le renouveau de notre forme de vie, le développement de l’activité apostolique ainsi que d’autres sujets de grande importance pour la vie de l’Ordre, sur lesquels tous les frères devront être consultés auparavant ».

[22] A. Calabrese, Istituti di vita consacrata …, cit., p. 152. « Le chapitre se présente comme une assemblée collégiale représentative de tout l’institut [...], l’autorité dont jouit le chapitre général est interne à l’institut [...] en tant que tel, il est dotée par l’Église du pouvoir de légiférer ou de promulguer des règles contraignantes [...]. Cette faculté délibérative caractérise le chapitre et le distingue de tout autre type d’assemblée, assemblée générale, congrès ou autre [...] qui restent toujours des organes de consultation » (Sacrée congrégation pour les instituts de vie consacrée et les sociétés de vie apostolique, Natura e Finalità …, cit., 216-217).

[23] « Les codes fondamentaux des instituts religieux cléricaux de droit pontifical s’élèvent [...] au rang de lois, en tant qu’ils sont élaborés et promulgués par une autorité dotée du pouvoir législatif » (V. De Paolis, Il primo libro del codice: norme generali [cann. 1-203] [Le premier livre du code : normes générales ; can. 1-203], in Il Diritto nel Mistero della Chiesa [La loi dans le mystère de l’Église], I, Roma 19953, 362).

[24] « La compétence du chapitre général sur les constitutions, dont l’approbation est réservée à l’Autorité suprême de l’Église est une conséquence du fait qu’il est la plus haute autorité au sein de l’institut ».

[25] F. Iannone, Il Capitolo generale…, cit., 150 ; A. Calabrese, Istituti di vita consacrata …, cit., 66. Le chapitre général pourrait édicter des décrets (ou préceptes) généraux exécutoires (can. 31 § 1) et des instructions (can. 34 § 1) également dans le cadre de la gestion des biens patrimoniaux de l’institut ainsi qu’un règlement pour la célébration du chapitre général ou des statuts particuliers.

[26] Voir au no 65 où il délibère sur la manière d’observer la pauvreté ; au no 124,2 il se donne un règlement pour sa célébration ; au no 128,3 il approuve le statut de la curie générale… Dans l’édition italienne d’autres compétences peuvent se trouver à la voix « chapitre général » dans l’index systématique à la p. 273 (édition publiée par la Conférence Italienne des Ministres Provinciaux (CimpCap) de 2015).

[27] Iannone F., Il Capitolo generale…, cit., 151. « En principe, on peut affirmer à juste titre que tous les supérieurs religieux, tant personnes physiques que collégiales, ayant un réel pouvoir de gouvernement, peuvent exercer un pouvoir judiciaire sur leurs sujets dans le cadre de leur propre compétence, conformément à leur droit propre. Par conséquent, le chapitre général doit certainement être compté, sauf encore une fois disposition contraire du droit propre, parmi les juges (corps judiciaire) des religieux ».

[28] Auparavant cette limite n’était pas fixée et un frère pouvait recevoir une telle charge beaucoup plus de mandats consécutifs.

[29] Il est bon de rappeler que le droit de vote, qui est discuté au no 121,6 des Constitutions, en cas de service dans une autre circonscription que la sienne, ne s’exerce plus en cette dernière, mais là où l’on est en service et ce à partir de la fin de la première année de service (ord. 8/3,2), sauf en ce qui concerne les délégations dont les membres continuent à voter dans leur circonscription d’appartenance.

[30] Pour les autres compétences, voir l’édition italienne de nos constitutions à la voix « chapitre provincial » dans l’indice systématique pp. 274-275 (Edition publiée par la CimpCap en 2015).

[31] Quelques contenus du pouvoir du custode : il peut admettre au postulat, au noviciat et à la profession, s’il est délégué (Const. 20,1), il annonce et convoque le chapitre de la custodie (Const. 136,3) peut convoquer le chapitre extraordinaire (Const. 136,7) peut établir des conventions avec d’autres circonscriptions ou conférences des supérieurs majeurs (Const. 138,5) il peut approuver des statuts et des normes particulières pour une maison ou fraternité (ord. 12/3) : voir l’édition italienne de nos constitutions à la voix « custode » dans l’indice systématique pp. 274-275 (Edition publiée par la CimpCap en 2015).

[32] Le ministre provincial (ou général) peut se réserver certaines facultés et ne peut déléguer que celles qui sont délégables en vertu du droit commun et de nos constitutions.

[33] Parmi ceux-ci, il est important de noter qu’il peut conférer la faculté de recevoir la confession des frères pour des cas individuels et ad modum actum (Const. 115,1) et de dispenser de la clôture en cas d’urgence et ad modum actum (Ord. 6/2,3) et que même s’il y a un économe dans une fraternité, le gardien reste responsable de l’administration.

[34] Ord. 8/32 établit que « les présidents des conférences, convoqués par le ministre général, se réunissent avec le ministre général et son conseil au moins tous les deux ans ».

Dernière modification le lundi, 07 décembre 2020 23:58